Venetia in Tenebris
Vous souhaitez réagir à ce message ? Créez un compte en quelques clics ou connectez-vous pour continuer.

Venetia in Tenebris

Au Nom du Père, au Nom du Fils, au Nom du Vice : l'Eternel ne saurait pardonner leurs crimes.
 
AccueilAccueil  RechercherRechercher  Dernières imagesDernières images  S'enregistrerS'enregistrer  TopsitesTopsites  ConnexionConnexion  
-20%
Le deal à ne pas rater :
-20% sur le Lot de 2 écrans PC GIGABYTE 27″ LED M27Q
429 € 539 €
Voir le deal

 

 La foule des aveugles ne vaut pas un seul voyant..

Aller en bas 
2 participants
AuteurMessage
Lacryma
Vampire / Aide Menuisier / Alchimiste Ancien Chef de la Maschera
Lacryma


Masculin
Nombre de messages : 127
Age : 37
Race : Démon incarné/Vampire
Date d'inscription : 30/03/2008

Carnet
Âge du Personnage: Plus de trente, trois cents ans ou celui d'un monde, au choix.

La foule des aveugles ne vaut pas un seul voyant.. Empty
MessageSujet: La foule des aveugles ne vaut pas un seul voyant..   La foule des aveugles ne vaut pas un seul voyant.. Icon_minitime1Sam 17 Mai - 18:43

"… Et allez en paix."

Chacun se signa. Chacun à sa manière : pieusement, rapidement, de façon ostentatoire ou discrète, un temps en avance, un temps en retard, machinalement, consciencieusement… Par le Père, le Fils et le Saint-Esprit, la messe est enfin finie. Femmes et hommes se retrouvèrent de nouveau ensemble dans la travée qui menait jusqu'aux portes qui, pour un certain nombre, les libéraient enfin d'un sermon un peu trop culpabilisant pour être apprécié. Mais voilà, pour que les ouailles n'aillent pas prier à la chapelle d'une langue plus habile ou d'une foi plus pure, le curé de la petite église de ce quartier de la Sérénissime ne s'autorisait ce genre de prêche qu'un dimanche sur cinq, le reste du temps restant dans un consensus qui convenait à tous, et tous, finalement, revenait la semaine suivante.

Naturellement Lacryma faisait partie de ceux qui passaient leur temps en songeries, réflexions et élaboration de desseins bien éloignées des considérations du sacré et bien que son visage n'en fasse pas étalage, il était satisfait de pouvoir enfin sortir respirer l'air que le soleil réchauffait plus divinement que toutes les prières du monde ne pourraient jamais le faire. Il est vrai qu'ayant déjà fait plusieurs fois l'inventaire de tout ce que l'architecture de l'église pouvait avoir d'intéressant, l'analyse de la manière de discourir du curé, la comparaison des atouts physiques de la population qui l'entourait ou l'observation du spectacle des œillades échangées discrètement et des murmures des têtes faussement pénitentes, l'ennui commençait d'être vraiment pesant. Ah l'agitation des ruelles et canaux environnants ! ………

C'est après avoir averti sa petite femme de la probabilité d'un retour tardif qu'encore vêtu de ses vêtements du dimanche d'un rouge aussi sombre que les cerises de juin, il s'enfonça dans la foule du marché dominical comme on plonge dans une eau mouvante. Respirant les odeurs des corps et marchandises autant que les effluves des âmes, avec un délice qui semblait ne pas faire de différence entre la laideur et la beauté, presque avec désir, ou plutôt avec cette gourmandise qui même si elle ne devait pas être assouvie dans l'instant lui faisait étrangement briller les yeux, Lacryma s'apprêtait à aller visiter une connaissance, une langue bien pendue, des oreilles bien attentives et des yeux très observateurs. C'est très probablement ce qu'il aurait fait si…

Un parfum presque écœurant mais si léger qu'il était quasi imperceptible passa sous ses narines comme quelques notes échappées d'une des fenêtres ouvertes sur la rue. Par réflexe de simulation sa démarche ne s'en trouva guère changée mais ses sens étaient passés de l'état de passive assimilation à agressive prospection. Les narines frémissaient légèrement, l'alchimiste, le vampire et le démon tous ensembles attentifs aux sons, aux choses alentours. Un moment il avait envisagé la possibilité de s'être trompé, mais toujours aussi légèrement l'émanation s'était fait sentir puis plus rien. Ca n'était pas les poissons, la chair faisandée, ça ne pouvait pas être l'eau stagnante ou la sueur des passants. Les rats ? Les rats ne sentaient pas si fort, pas comme ça. Un habitant des maisons qui bordaient le marché et que la maladie rongerait ? Or c'était trop… et puis en même temps pas assez…

Pour la première fois agacé de la présence de tant de gens autour de lui, il aurait préféré être seul, pouvoir se concentrer uniquement sur ce qu'il avait passagèrement senti. Ou ressenti ?

Cependant il lui fut impossible d'y consacrer toute son attention quand le sens que chacun possède de manière plus ou moins présente le prévint d'un regard un peu trop fixe posé sur lui. Coïncidences ou hasard ? Et dans les circonstances… Lacryma se retourna pour mettre un visage sur cette impression. Un visage fin et si clair qu'il était impossible de ne pas remarquer la couleur si particulière des yeux. Les siens ne cillèrent pas et si sa position paraissait la plus naturelle du monde, comme s'il avait cru entendre cette femme qui s'habillait comme un homme (mais les odeurs ne trompent jamais à ce sujet) l'interpeler, son regard avait pris une fixité dont il n'usait que rarement en plein jour.


[C'est pas extra, j'en suis conscient, mais je me rattraperai la prochaine fois promis]
Revenir en haut Aller en bas
http://kheleil.deviantart.com/
Samara Visconti
Alchimiste / Grand Exorciste / Humaine (?)
Samara Visconti


Féminin
Nombre de messages : 251
Age : 31
Race : Humaine (?)
Emploi ou fonction : Très compliqué tout ça...
Pouvoirs : Ca aussi d'ailleurs.
Date d'inscription : 20/03/2008

Carnet
Âge du Personnage: Apparemment la vingtaine

La foule des aveugles ne vaut pas un seul voyant.. Empty
MessageSujet: Re: La foule des aveugles ne vaut pas un seul voyant..   La foule des aveugles ne vaut pas un seul voyant.. Icon_minitime1Dim 18 Mai - 22:14

Elle n’était pas allée à la messe – elle n’y allait plus depuis la mort de son « père », le meurtre serait plus juste. Les églises lui faisaient horreur et elle ne supportait que très difficilement d’en apercevoir une, lorsqu’elles grouillaient dans les rues de Venise, de la plus belle à la plus laide. Ces bâtisses lui évoquaient invariablement des cadavres grouillant de vers, du sang et de la mort, les images les plus horribles s’imposaient à elle quand elle les contemplait. Pourquoi, elle l’ignorait… Etait-ce parce qu’elle appartenait à la race de ceux que Dieu a chassés, la race de ceux que Dieu méprise, ceux qu’il envoie enfin pour exécuter ses tâches les plus basses ?
Elle marchait tranquillement le long des canaux, humant les odeurs du marché avec un contentement mal dissimulé : elle aimait bien ces journées, douces et agréables, où l’air était bon et les rues animées. Elle se sentait moins en sécurité que dans l’humide solitude de ses ruelles mal famées et pourtant aurait très bien pu rester des heures adossée à la façade d’un palais, les yeux clos.
Ce jour-là elle avait encore choisi d’évoluer en femme – surtout après sa discussion avec ce Manuelo, elle était encore plus dégoûtée du sexe féminin qu’auparavant – et ses longs cheveux étaient attachés en catogan. Quelques mèches caressaient son visage au rythme d’un vent très léger venu de la mer, c’était si agréable. Elle se hasarda même à sourire, autant qu’elle en était capable, c’est-à-dire très peu. Elle avisa alors un bateau regorgeant de fruits et légumes. Une escarcelle bien fournie pendait à son côté : pourquoi ne pas s’offrir une pêche ou quelque chose d’autre ?
Oui, mais…
Un frisson électrique parcourut son échine, elle se retint de sursauter : il y avait un ange ou un démon dans les parages. Elle ne parvenait pas à bien distinguer l’essence de cette aura ; cet être venait-il de Géhenne ou du Ciel ? Elle frémit de nouveau : serait-ce une de ces créatures qu’elle n’avait encore jamais dû affronter ?… Un démon supérieur ? Elle chercha aussitôt du regard l’origine de cette aura qui la chatouillait d’un peu trop près.
Elle eut tôt fait de repérer cet homme apparemment tout ce qu’il y a de plus banal, en habits du dimanche couleur cerise, un homme comme il y en a tant à Venise. Elle fronça les sourcils : elle avait pour habitude de ne pas se fier aux apparences et lui… lui… il n’avait rien d’humain dans l’âme, son aura était celle d’un être aux pouvoirs bien au-delà de ceux d’un simple alchimiste ou sorcier. Elle siffla entre ses dents : quel beau poisson !
Sa main droite chercha instinctivement la garde de son épée, elle l’observa discrètement mais sans relâcher son attention, attendant impitoyablement. Elle ignorait encore comment elle agirait avec tous ces gens autour, toutefois elle n’allait pas renoncer alors qu’elle avait sous la main une proie aussi parfaite. Une proie ? Samara n’osa guère ricaner pour elle-même : s’il était aussi puissant que son aura le laissait présager, elle jouerait elle-même le rôle de la proie. Evidemment, ce serait tout de suite moins drôle…
Elle ne put cette fois s’empêcher de sursauter : il l’avait repérée, il avait senti son aura à elle, pourtant presque imperceptible. Leurs yeux s’étaient rencontrés, entrechoqués presque comme les lames de deux épées ; Samara se mordit la lèvre inférieure en bénissant soudain le Ciel de se trouver en présence de tant de personnes. Elle aurait au moins le temps de jauger son adversaire avant d’attaquer, de vérifier si elle ne s’était pas trompée.
Il avait le regard terriblement fixe. Ce n’était pas humain – mais avait-elle encore besoin d’une preuve de son inhumanité ?
Elle resta immobile. Le laisser venir… s’il le désirait. S’il s’esquivait, elle le suivrait dans les ruelles et considérerait cela comme une preuve de faiblesse. Elle redressa légèrement le menton en signe de défi, ses yeux d’améthyste étincelèrent. Les jeux étaient faits, à voir qui allait gagner.


[C'est pas mieux. Moi aussi ferai mieux la prochaine fois]
Revenir en haut Aller en bas
Lacryma
Vampire / Aide Menuisier / Alchimiste Ancien Chef de la Maschera
Lacryma


Masculin
Nombre de messages : 127
Age : 37
Race : Démon incarné/Vampire
Date d'inscription : 30/03/2008

Carnet
Âge du Personnage: Plus de trente, trois cents ans ou celui d'un monde, au choix.

La foule des aveugles ne vaut pas un seul voyant.. Empty
MessageSujet: Re: La foule des aveugles ne vaut pas un seul voyant..   La foule des aveugles ne vaut pas un seul voyant.. Icon_minitime1Mer 21 Mai - 19:58

Mnémosyne… Cheveux blonds, visage qu'on aurait qualifié d'adorable sans la froideur qui le parait, femme volontaire ou homme aussi fin que dangereux, et surtout, surtout, des yeux pas humains, ou c'est qu'ils ne courent pas les rues ceux qui ont des yeux pareils. Violets. Pailletés, comme ceux des chats, voyez ? Cette description on la lui avait donnée plusieurs fois, il l'avait répétée à son tour sans pour autant avoir jamais posé les yeux sur le modèle de cet étonnant portrait. Jusqu'à cet instant. Douce Mémoire. Les pupilles s'étrécirent brièvement, si seule son âme devait être décrite durant ce moment si court, l'image d'un fauve amaigri dont les yeux se seraient posés sur une proie aussi belle que désirable aurait su faire l'affaire. Mais les fauves cèdent à leur faim autant qu'ils n'iraient jamais se priver volontairement pendant des jours, encore moins des semaines, au contraire de Lacryma.

Pour un peu il en aurait oublié cette étrange flagrance et à ce point intrigante qu'elle l'avait mené jusque là. Au lieu de ça il se trouva hésitant, observant Samara d'un air pensif, la tête légèrement penchée sur le côté. Samara, voyons, cette Alchimiste "indépendante" qui trouvait bon de renvoyer d'où ils venaient anges et démons, pauvres acteurs qui ne pourraient faire profiter le public de leur jeu ! Définitivement, une occasion pareille ne pouvait se manquer. Et puis après tout, il ne restait plus une trace et la sulfureuse émanation cela lui prendrait probablement des heures pour la retrouver au milieu de ce bordel d'odeurs et il ne pouvait errer le nez en l'air et aspirant à grand trait en plein marché parmi des passants qui auraient tôt fait de se montrer… contraignants. Enfin c'était l'occasion de secouer un peu cette étonnante mélancolie qui le prenait un peu trop souvent ces derniers temps.

Ses paupières clignèrent de nouveau comme chez tout un chacun, ses traits perdirent leur apparence figée, et le voilà qui se retrouvait en quelques enjambées auprès de la demoiselle. Le presque sourire qu'il arborait n'était pas celui qu'on lui connaissait en Haut ou en Bas, c'était celui de Cortorella, franc mais si léger, et (signe de perversité ou de professionnalisme ?), le geste de la tête qu'il adressa à des connaissances de comptoirs ne dénotait pas plus. Le ton lui-même, grave et sérieux, presque toujours songeur, un peu trainant, se mariait à l'ensemble. C'était sans compter sur les mots :


" Et la voici… La méchante chasseuse (ce disant il n'avait pas l'air de faire un reproche à la jeune femme mais plutôt d'un ami ou parent parlant de quelqu'un d'autre, une passante peut-être ? Un quidam qui avait saisi la phrase au vol jeta un coup d'œil alentours, cherchant vaguement qui était la cible de cette critique). Certains se demandent si elle a l'assurance de vivre éternellement en ce monde, car vraiment, elle s'est fait de bien nombreux ennemis dans les autres. Enfin… On dit que Dieu reconnaît les siens, alors…"

Au bateau dont les fruits avaient tenté la jeune alchimiste un peu plus tôt, il jeta une pièce. Du bateau on lui jeta une pomme. Pas de pêche, pas de poire, non non. Encore moins d'orange.

"Un fruit peut-être ? Celui-là n'est pas défendu."

Étirement, comme si être resté si longtemps dans l'église lui avait suffisamment pesé sur les lombaires pour qu'il le ressente encore, comme un homme qui s'éveille d'une sieste mal positionnée, seules les épaules bougeant.

"Ahh… C'est vraiment une chance. J'ai prévu de ne pas m'ennuyer ce matin. Entre donc dans le jeu, si tu gagnes, des nouvelles et la bonne aventure gratis, sinon… Eh bien je suppose que les gens penseront voir une maîtresse bafouée se venger de qui l'a trompée."

Et le ton était toujours le même, malgré la malice des paroles, malgré la flamme au fond des yeux qui s'amusait de ces provocations à bon compte. Légère (?) auto dépréciation. Pas de menaces, lorsqu'il attaquait il prévenait si rarement qu'on aurait pu aisément en compter le nombre de fois. Efficacité toujours. Et sous leurs dehors anodins, ses paroles avaient été pesées. Un nouvel acte de sa pièce pouvait se déclencher de cette rencontre, il préférait naturellement que celui-ci lui soit favorable. Hmmm, quel dommage malgré tout qu'une telle edelweiss lui fasse obstacle. Tandis qu'il la regardait toujours avec cette allure et cette proximité à la fois familières et courtoises, masques de l'attention et de la tension, il se prit à se demander si, comme celles qu'il avait observées longtemps auparavant, elle supportait ou non ce que beaucoup prenait pour de la boue humaine et qui l'entourait.
Revenir en haut Aller en bas
http://kheleil.deviantart.com/
Samara Visconti
Alchimiste / Grand Exorciste / Humaine (?)
Samara Visconti


Féminin
Nombre de messages : 251
Age : 31
Race : Humaine (?)
Emploi ou fonction : Très compliqué tout ça...
Pouvoirs : Ca aussi d'ailleurs.
Date d'inscription : 20/03/2008

Carnet
Âge du Personnage: Apparemment la vingtaine

La foule des aveugles ne vaut pas un seul voyant.. Empty
MessageSujet: Re: La foule des aveugles ne vaut pas un seul voyant..   La foule des aveugles ne vaut pas un seul voyant.. Icon_minitime1Dim 25 Mai - 14:56

Une dangereuse impression d'être observée, toisée et découverte d'un simple regard... Samara sentit que ce non-humain avait deviné la moindre parcelle de son identité, sans aucune difficulté ; un tour de force à n'en pas douter. Car il ne s'agissait pas seulement de la reconnaître comme Samara Visconti mais bien comme le Grand Exorciste et cela la jeune femme ne le supportait pas. Elle eut l'impression de faire face à une bête sauvage dont l'intelligence aurait pris des proportions loin de l'imagination humaine et sentit que ce jeu serait éminemment intéressant. Un mince sourire para ses lèvres, elle ne savait pas quant à elle qui il était et avait bien l'intention de le découvrir - dût-elle pour cela écoper les moindres ruelles de Venise à la recherche d'un quelconque renseignement. Elle n'était sûre que d'une chose : cet homme détenait un pouvoir immense. Elle resta sur son hypothèse de "démon supérieur", la plus plausible en l'occurrence.
Si elle parvenait à renvoyer cet importun dans son monde d'origine ce serait une grande gloire et son Ange gardien serait probablement ravi. Jusqu'ici elle n'avait eu à affronter que de misérables créatures venues des bas-fonds d'Atziluth, Ciel comme Géhenne ; de pauvres enfants venus contre leur gré et presque heureux de retrouver leur vraie demeure. En omettant sa rencontre la veille avec Manuelo - qui n'était pas assimilable à un combat digne de ce nom - elle n'avait jamais combattu et assassiné que des victimes tout à fait consentantes. Voilà qui promettait d'être bien plus intéressant que ces pitoyables êtres, voilà qui promettait d'être une vraie bataille. Samara se l'avouait à contre-coeur : elle aimait ces batailles, elle aimait le sang sur ses mains de plus en plus au fur et à mesure des jours. Fini, la jolie colombe pacifique...
Elle sut qu'il viendrait vers elle dès qu'il perdit son attitude figée, elle l'attendit avec une expression tout à fait réjouie, comme celle d'un jeune homme retrouvant un vieil ami depuis longtemps perdu de vue. Seul un oeil entraîné aurait su déceler la lueur dans son regard, la lueur appelant au meurtre - froideur certes, un brin de curiosité peut-être. Elle savait fort bien qu'il le verrait. Tant mieux, après tout ! Elle passa le bout de sa langue sur ses lèvres, comme un félin attendant son repas, sa proie même. Elle l'accueillit à ses côtés d'un signe de tête presque respectueux et l'écouta parler sans l'interrompre, toujours souriante - un sourire de plus en plus méchant au fil des mots. La foule grouillante autour d'eux ne faisait pas attention à eux, ils avaient parfaitement l'air de deux jeunes hommes en pleine discussion amicale.
Illusion.

- Ma réputation est donc faite. Mais quelle impolitesse, monsieur, il est coutume de se présenter lors d'une première rencontre. Surtout quand on s'adresse à... une dame.

Elle prononça ces dernières paroles en ricanant à moitié, comme si elle n'y croyait pas elle-même. Elle le regarda attraper une pomme au vol et la lui tendre, l'offrant comme le Serpent à Eve. Eve... Quel sujet intéressant que cette demoiselle. Si elle était née de la côte d'Adam comme les Ecritures le racontaient, comment se faisait-il qu'elle fût une femme ? En vérité elle devait posséder le même génome qu'Adam lui-même et donc être un homme. Eve était un travesti. Samara se sentit presque fâchée d'être assimilée dans une scène pareille à cette misérable créature.

- Je regrette, mais je ne préfère pas tenter le Diable, railla-t-elle en lançant la pomme à un gamin qui passait à proximité, pieds nus. Voilà que vous faites une bonne action par chasseresse interposée. Je suis navrée, termina-t-elle du ton de quelqu'un qui n'est absolument pas désolé.

L'atmosphère lui paraissait menaçante, cependant elle s'amusait fort de cette rencontre. Ce serait vraiment un plaisir de détruire cet être et de le renvoyer d'où il venait... Troublée toutefois, elle s'étonnait fort de ne pas réussir à percevoir proprement son aura ; elle n'avait réussi à acquérir aucune information sur lui. Ni son âge, ni le temps qu'il avait passé sur terre, ni aucune indication d'un quelconque sens. Il jouait fort bien son rôle d'humain, jusqu'à aller mettre les pieds dans une église et s'étirer pour ôter de ses épaules la lassitude des prières. Si elle n'avait pas senti le poids de chaque parole, vu la flamme dans les yeux profonds, elle aurait presque cru s'être trompée. Le jeu commençait.

- Entrer dans le jeu ? Mais il a déjà commencé et nous y sommes embourbés jusqu'au cou, l'un comme l'autre. Jouons donc, et malheur à celui qui perdra.

Elle accompagna ces paroles d'un sourire impossible à interpréter. La balle n'était plus dans son camp, elle attendait le prochain coup avec la plus grande impatience et dans son attitude sereine et décontractée quelque chose respirait l'attente. L'excitation...
Revenir en haut Aller en bas
Lacryma
Vampire / Aide Menuisier / Alchimiste Ancien Chef de la Maschera
Lacryma


Masculin
Nombre de messages : 127
Age : 37
Race : Démon incarné/Vampire
Date d'inscription : 30/03/2008

Carnet
Âge du Personnage: Plus de trente, trois cents ans ou celui d'un monde, au choix.

La foule des aveugles ne vaut pas un seul voyant.. Empty
MessageSujet: Re: La foule des aveugles ne vaut pas un seul voyant..   La foule des aveugles ne vaut pas un seul voyant.. Icon_minitime1Dim 25 Mai - 17:03

- Ah la fougue de la jeunesse… Les grands mots, les grands gestes, et puis quand vient l'heure de payer ses erreurs…

Intérieurement il souriait malicieusement, mais au monde il offrait un masque au sourire mélancolique, avec ce genre d'expression qu'ont certains hommes quand ils sentent arriver les premières affres du vieillissement. Presque plus par jeu que par réelle nécessité de respecter son rôle, il leva sa main et reprit point par point les propos qu'on lui avait adressé en les comptant sur ses doigts :

- Enfin… Vous disiez ? Ah, c'est vrai ! Toutes mes excuses pour cet impardonnable manque de courtoisie de ne pas me présenter. Mais j'aurais pensé qu'il était évident qu'inquiété par votre impressionnant tableau de chasse, je préfère taire mon identité. J'imagine fort mal la scène si vous surgissiez brusquement chez moi pour me renvoyer d'où je viens : ma femme pourrait avoir un geste malencontreux et je n'aimerais pas qu'en vous défendant vous la blessiez. Elle est si jalouse… Comme vous le dites, mieux vaut ne pas tenter le Diable, bien que je pense qu'il ne s'intéresse pas vraiment à ce genre de petits jeux. Au regard du monde, il me paraît qu'il ait mieux à faire. Mais sait-on jamais… Il suffirait qu'il s'ennuie au mauvais moment.

Cette inversion des rôles lui plaisait. Tout comme les ambiguïtés des paroles et le regard de la jeune femme, si plein d'anticipation. Bien des siècles plus tard, on aurait pu décrire ce qui se passait comme une scène d'un classieux polar aux couleurs sombres mais à la chaleur d'une lumière artificielle, aux odeurs de tabac, aux accents bluesy, la violence en toute désinvolture. Lacryma inclina légèrement la tête en signe de déférence ou de pénitence, difficile à dire.

- Quoi qu'il en soit, je le répète, je vous prie d'accepter mes excuses. D'ailleurs vous n'avez pas à vous sentir navrée, vous-même. Ou me pensez-vous si mauvais que l'idée de la moindre bonne action me rebute ? Tant de préjugés... Il secoua la tête d'un air un peu réprobateur, mais avec toujours une apparente affection.Tenez, si vous ne craignez pas le genre de compagnie qu'on y trouve, je vous invite à cette taverne, là-bas, celle qui donne sur le canal. Mais ne vous sentez pas obligée, poursuivit-il en posant brièvement une main ferme sur son épaule, comme pour rassurer cette vieille connaissance qu'ils jouaient qu'elle était, c'est comme le jeu, on peut toujours cesser, il suffit de se souvenir que ce n'est qu'un divertissement, un passe-temps.

Sauf qu'au lieu d'attendre véritablement son aval, il commençait déjà de se diriger à pas lents, un peu nonchalants, un peu paresseux (après tout le marché, le soleil et la sortie d'église s'y prêtaient bien). Il ne lui était pas nécessaire de la regarder, son analyse visuelle avait été satisfaite pour le moment. A présent il s'intéressait aux odeurs dégagées, même si elles étaient plus difficilement perceptibles dans cette ambiance mouvante et que le self-contrôle de son vis-à-vis n'offrait pas beaucoup de prises. La voix aussi était intéressante, cette froide agressivité, ce ton cassant. Avait-elle perdu une seule fois dans ces combats qui l'avaient opposée aux incarnés ? Il ne pouvait s'empêcher d'en douter car dans ce cas, il était probable qu'elle eut appris à jouer d'humilité, même hypocrite. Quant à lui, malgré la réputation qu'elle avait, il lui avait tourné le dos sans la moindre crainte. La foule était un excellent prétexte à retardement des hostilités. Excellent par ce que c'était l'occasion rêvée de satisfaire une curiosité toujours en éveil. Lorsqu'on vit si longtemps, comment ne pas apprécier l'originalité, les histoires peu ordinaires ?
Allons, voilà qu'il était près de regretter la poursuite lancée contre elle par la Maschera. Cette fille semblait intéressante, à première vue tout du moins comme un prologue captivant, et si pour des raisons politiques il n'avait renoncé à la solution radicale qu'il avait décidée il y avait déjà quelques temps, il ne désirait pas presser trop l'échéance. Et puis comme on dit, les trop gourmands ne sentent plus le goût de rien, les trop bandants sont incapables de profiter du corps de leur maîtresse et les trop pressés mangent des pissenlits par la racine avant d'avoir récolté ce qu'ils avaient semé. Ah oui vraiment, quand le moment serait venu, il saurait bien s'arranger pour ajouter du piquant à la chose, pour s'en souvenir longtemps.

Sortant soudainement de ses pensées et comme pris d'une inspiration subite, il se retourna vers Samara à quelques pas de la porte qu'il lui avait désignée :


- Au fait, savez-vous ce qu'on dit ? Notre brillant Seigneur pourrait fort faire une apparition. Je sais, ce sont des rumeurs, mais faut l'avouer, c'est excitant. Et puis ça risque d'attirer du beau monde dans la Sérénissime, ce serait bon pour les affaires, même si les mauvaises gens seront probablement attirées elles aussi par l'agitation.

Allusion, double-sens, différents niveaux de compréhension, sur quelle carte allait-elle choisir de miser ? Ce disant il avait parcourut la distance restante à reculons et poussa la porte sans la quitter des yeux, avec une expression impassible ou seul le regard jetait un défi amusé : si elle se décidait à entrer, il lui faudrait le frôler. Ce genre de femmes supportait la proximité ? Sans parler de véritables contacts. Peu importe, de toute façon, c'était toujours… équivoquement plaisant.
Revenir en haut Aller en bas
http://kheleil.deviantart.com/
Samara Visconti
Alchimiste / Grand Exorciste / Humaine (?)
Samara Visconti


Féminin
Nombre de messages : 251
Age : 31
Race : Humaine (?)
Emploi ou fonction : Très compliqué tout ça...
Pouvoirs : Ca aussi d'ailleurs.
Date d'inscription : 20/03/2008

Carnet
Âge du Personnage: Apparemment la vingtaine

La foule des aveugles ne vaut pas un seul voyant.. Empty
MessageSujet: Re: La foule des aveugles ne vaut pas un seul voyant..   La foule des aveugles ne vaut pas un seul voyant.. Icon_minitime1Dim 1 Juin - 15:07

Elle esquissa un sourire sarcastique, oh il ne voulait donc pas se présenter et taire son identité ? Les jeux étaient faits… et elle aimait beaucoup les devinettes. Elle décida de se laisser le temps de découvrir qui il était réellement derrière le masque affable d’un homme allant peu à peu vers le temps du repos. Sans doute la surprise finale serait-elle immense.

- J’ignorais que les êtres dans votre genre étaient capables de supporter une épouse au quotidien. Les femmes ont la vile tendance à être jalouses, collantes, capricieuses et surtout éminemment perspicaces. Une véritable plaie, lança-t-elle d’un ton nonchalant en jouant avec une mèche blonde s’échappant de son catogan.

Dans un film noir, elle aurait tiré sur sa cigarette avec un sourire mystérieux – les yeux brillants. Ici elle dut se contenter du sourire, calme, tranquille et calculatrice comme un fauve. Elle se surprenait elle-même à parler autant, d’ordinaire elle restait fort silencieuse et jouait le rôle du rapace observateur qui fond sur sa proie sans un bruit. Il n’était pas dans ses habitudes de faire le félin et de jouer avec sa future victime comme elle le faisait présentement. Elle essaya de se reprendre : elle se laissait porter par l’amusement du jeu, elle ne réfléchissait pas assez, devenant l’archétype féminin qu’elle haïssait.
Lorsque la main de l’homme se posa sur son épaule, elle eut un très léger sursaut comme si une décharge électrique l’avait parcourue. Ses sourcils se froncèrent imperceptiblement et elle le suivit du regard tandis qu’il se dirigeait vers la taverne – ah, un nouveau cadre pour le jeu ? Elle hésita un instant, non pour savoir si elle allait le suivre mais pour se demander préalablement quel alcool allait chatouiller sa gorge. Elle opta mentalement pour un grand verre de lacrima christi – blanc. Le vin, ce n’était pas grand-chose mais ce n’était qu’un commencement. Autant ne pas être ivre dès le début de leur dialogue.
D’un pas très nonchalant, elle le suivit jusqu’à la taverne, les doigts glissés dans les passants de sa ceinture. Elle vérifia discrètement si elle portait toujours au côté une petite escarcelle pleine non pas d’or mais d’une poudre qu’elle avait découverte récemment aux effets dévastateurs. Elle caressa presque amoureusement le cuir bouilli et reporta son attention sur l’homme : il lui tournait le dos, se sachant protégé par la foule – elle eut presque l’envie soudainement de faire fi de tous ces gens sans intérêt pour déclencher immédiatement la bataille. Non. Ce n’était pas vraiment ce qu’on pouvait appeler une bonne idée.
Voilà qu’il parlait de nouveau… oh… intéressant. Elle eut de nouveau un petit sourire et lâcha très calmement :

- Notre Seigneur ? Qui vous dit qu’il n’est pas déjà en ville, incognito ? Ce serait peut-être bien son genre, allez savoir. Vous le connaissez certainement mieux que moi…

Il poussa la porte et se plaça de manière à ce qu’elle dût le frôler pour passer. Son sourire se transforma en rictus, elle n’aimait pas les contacts physiques et surtout avec des inconnus… mais peu importait. Sans broncher, elle pénétra dans l’auberge et alla s’asseoir à une table de deux, légèrement à l’écart sans pour autant les isoler totalement. Assez seuls pour pouvoir parler, assez en vue pour que le combat fût retardé un peu plus.
Elle attendit qu’il la rejoignît et continua, toujours aussi calme.

- Les on-dit sont toujours une source d’inspiration très intéressante. Tenez, par exemple, on dit qu’il y aura bientôt du grabuge dans les prisons…

Une serveuse arriva pour prendre leurs commandes, elle faillit lui demander son verre de vin puis se ravisa et demanda une bouteille – juste pour elle-même. Autant ne pas avoir à rappeller cette fille avant un petit bout de temps.
Revenir en haut Aller en bas
Lacryma
Vampire / Aide Menuisier / Alchimiste Ancien Chef de la Maschera
Lacryma


Masculin
Nombre de messages : 127
Age : 37
Race : Démon incarné/Vampire
Date d'inscription : 30/03/2008

Carnet
Âge du Personnage: Plus de trente, trois cents ans ou celui d'un monde, au choix.

La foule des aveugles ne vaut pas un seul voyant.. Empty
MessageSujet: Re: La foule des aveugles ne vaut pas un seul voyant..   La foule des aveugles ne vaut pas un seul voyant.. Icon_minitime1Dim 1 Juin - 20:59

Il prit son temps. D'ailleurs pourquoi ne l'aurait-il pas pris, son âme, son corps actuel comme naturel étaient éternels disait-on ? Un signe de tête pour des connaissances lointaines un sourire à une blague vaseuse d'un autre paroissien que la messe avait passablement ennuyé, quelques rudes serrements de mains avec des acolytes, échanges de saluts et de brèves nouvelles. Et le petit ? Des nouvelles de la vieille Carlotta ? Le pont enfin réparé. As-tu vu la nouvelle épouse de messer Bardi ? Les hommes tous juste sortis de l'église semblaient éprouver le grand besoin de retourner au plus vite aux plaisirs et petites histoires très matériels du monde après avoir subi la promesse des satisfactions immatérielles de l'autre. Certains coulaient des regards curieux vers cette personne qui était entrée avec lui ou haussaient des sourcils interrogateurs à l'intention de Lacryma qui se contentait de vagues "ami", "fils d'ami" dont, le connaissant plus ou moins à leur façon, ils se satisfèrent… En effet, à cette heure-ci les étrangers étaient plutôt rares et les habitués de la deuxième messe se connaissaient pour la plupart au moins de vue.

Enfin, tandis que la jeune femme reprenait le fil de leur conversation momentanément interrompue, il s'assit avec l'apparente satisfaction de pouvoir finalement étendre et reposer ses jambes. Les bancs de la maison de Dieu ne sont pas connus pour leur confort, et puis il fallait se lever, se rasseoir, se relever… Cela valait bien une petite bouteille de vin rouge pour le personnage qu'il incarnait. La serveuse repartit.


- J'en ai entendu parlé aussi. Ce n'est pas vraiment surprenant, mal gardée, les portes fissurées… Ca donne des idées aux prisonniers. Il est probable qu'il y est déjà eu des escapades.

Ses yeux un peu perdus dans le vague après s'être assis, puis qui s'étaient attardés d'un air songeur sur le visage d'un jeune homme accompagné de ce qui devait probablement être son père et qui attirait plus l'attention de part la langue dans laquelle il devisait, ses yeux donc se reportèrent vers le visage dont les traits étaient si fins qu'il était surprenant qu'elle arrive à se faire passer si bien pour un homme. Elle avait bien choisi sa place pas de doute, très professionnelle vraiment, si le soir les coins et l'ombre prêtaient à soupçons, en plein milieu de journée cela pouvait simplement être révélateur d'envie de calme. Au vu du peu d'intérêt qu'on leur portait désormais, c'était probablement ce que tout le monde pensait, les curieux étant plus intéressés par les deux étrangers. Néanmoins il attendit pour reprendre la parole que les bouteilles soient posées et débouchées sur leur table et la serveuse partie une fois de plus après qu'il ait payé d'avance leur consommation.

- A ta santé..

Aussi naturellement qu'il l'avait vouvoyé, il repassait au tutoiement. Négligeant le gobelet qu'on leur avait apporté il porta le goulot de la bouteille à ses lèvres sans pour autant avaler de nombreuses gorgées, se contentant d'apprécier momentanément le goût douceâtre.

- Tu vas en avoir besoin. Tous ces gens qui veulent ta peau, alchimistes et incarnés, toujours plus nombreux… Bientôt ils utiliseront un appât et tu ne verras pas l'hameçon. Tiens ! Un autre on-dit : on dit que tu n'as jamais renoncé à tuer.

Le ton de sa voix était toujours aussi basse et posée, toujours un peu mélancolique. Mais si tout le temps qu'il avait parlé son regard n'avait pas cillé comme pour souligner cette soudaine franchise, à la fin il glissa une fois de plus vers les deux étrangers, surtout le jeune blondinet dont la face reflétait tant, tant d'innocence. Une rare pureté, une belle âme sans aucun doute…

- On dit aussi qu'une guerre sourde a déjà commencé, que les camps sont beaucoup plus flous qu'on ne pense. Et la grande question est : dans lequel se trouve-t-on ? Et de le savoir avant de qu'on ne se fasse broyer entre deux ou détruire par un ennemi inconnu. Enfin…

Une jolie lampée de nouveau. De nouveau regard méditatif vers l'autre table, tandis que ses doigts tapotaient le goulot d'un geste mécanique. S'il devait penser à Samara en tant que proie cela aurait été comme une créature à affronter en pleine lumière le genre qui exige un effort aigu, intense, mais finalement rapide. Deux carnivores, mais à des niveaux différents, problème territoriaux peut-être. En tous cas, plaisir du sport. A l'autre là-bas, c'était les longues nuits de douleurs artistiquement écossées de leur enveloppe pour en tirer cette essence dont le corps carnassier qu'habitait Lucifer avait autant besoin que du sang ; cet être-là était encore une page vierge, une eau claire sans goût. Plaisir de l'art. Peut-être…

- Je suppose que tu sais déjà cela. Tu ne tuerais pas simplement tous ceux qui auraient le malheur de ne pas être humain, n'est-ce pas ? Tu ne tuerais pas sans savoir ce qui se trame autour de toi, pas vrai ? Tu n'es pas du genre à être un pion aveugle, une marionnette, même si jolie et si bien faite…

L'ironie des mots se traduisit pour une fois sur ses traits.

[Bon une fois encore c'est pas extraordinaire mais je ne suis pas sûr de pouvoir me connecter la semaine prochaine donc ça t'évitera d'attendre trop longtemps.]
Revenir en haut Aller en bas
http://kheleil.deviantart.com/
Samara Visconti
Alchimiste / Grand Exorciste / Humaine (?)
Samara Visconti


Féminin
Nombre de messages : 251
Age : 31
Race : Humaine (?)
Emploi ou fonction : Très compliqué tout ça...
Pouvoirs : Ca aussi d'ailleurs.
Date d'inscription : 20/03/2008

Carnet
Âge du Personnage: Apparemment la vingtaine

La foule des aveugles ne vaut pas un seul voyant.. Empty
MessageSujet: Re: La foule des aveugles ne vaut pas un seul voyant..   La foule des aveugles ne vaut pas un seul voyant.. Icon_minitime1Mer 4 Juin - 20:14

Elle le suivait du regard d'un oeil torve à demi caché derrière ses paupières baissées. Il prenait son temps, il s'attardait négligemment et cela irritait un brin Samara - peut-être lui avait-il l'éternité pour s'amuser et converser avec de vieilles connaissances mais elle se savait parfaitement mortelle et de toute manière avait horreur de perdre son temps. L'angoisse éternelle des vivants qui savent que, lorsque l'heure sera venue, leur âme quittera cette enveloppe éphémère qui, si belle fût-elle quelques instants, deviendrait une pourriture immonde dans la tombe. Elle frissonna l'espace d'un instant, comme si elle avait vu la Mort tapie dans un coin - attendant de pouvoir bondir et s'en prendre à l'un des hommes présents dans cette taverne. Les femmes ne s'y aventuraient guère, soucieuse d'assurer leur réputation et de ne pas passer pour des ivrognes au regard de la société. Les seules qui pénétraient l'endroit étaient des matrones venues arracher leurs époux aux joies des spiritueux pour les forcer à s'adonner à celles, bien moins enivrantes certes, du dur labeur et de la paternité pour certains. La Visconti n'osait même pas s'imaginer comme une de ces créatures, dévouées à leurs maris et à leurs enfants, parfaites madones. Seigneur Dieu.
Enfin, l'homme vint s'asseoir à la table et commanda une bouteille de vin rouge. Elle eut un demi-sourire ironique : rouge sang et blanc pureté. C'aurait presque pu être l'inverse.
Presque.

- On raconte qu'il y en a eu une, une femme gardée sous haute sécurité - si tant est que cette expression ait un sens, bien sûr - et on pense que son frère l'imitera bientôt.

Elle avait à peine pris la peine de dissimuler le véritable sens de ses paroles, n'importe quel immortel aurait pu comprendre avec un peu de jugeotte ce dont elle parlait. Cependant ils étaient calmes et nul ne les épiait dans l'ombre - à moins qu'il y eût un habile dissimulateur renfoncé dans un des recoins les moins visibles mais Samara en doutait. Elle fixa un instant le jeune étranger qui attirait l'attention - seigneur, qu'il parlait fort - puis se concentra sur la bouteille que la serveuse venait de lui apporter. Des reflets d'or dans le vin blanc. Suavité délicieuse... Elle leva la bouteille en direction de l'homme comme pour porter un toast et la porta à ses lèvres pour en avaler une longue gorgée très douce. Une douce chaleur dans sa gorge, presque imperceptible.

- A la tienne...

Elle posa la bouteille sur la table et dessina des cercles imaginaires sur le bois noueux. Un petit sourire apparut de nouveau sur ses lèvres et elle releva le regard vers l'homme, le ricanement au bord des lèvres.

- Renoncer à tuer ? Et pour quoi, pour te faire plaisir ou pour respecter la morale ? Elle eut un rire bref et avala une gorgée de vin. Je fais ce qui me plaît, en l'occurrence couvrir mes mains de sang.

Elle ne sourcillait pas, son regard était droit et pétillant à la fois de haine et de malice. Elle se tenait négligemment appuyée au dossier de sa chaise, un coude appuyé sur ce même dossier et ses jambes croisées comme si elle était en plein dans une discussion parfaitement mondaine et civique. Elle suivit un instant l'oeillade de l'homme vers ce gamin, une oeillade intéressée. Il savait à coup sûr reconnaître la pureté d'une âme lorsqu'il la voyait, impressionnant - un peu. Du point de vue de Samara, aucune âme n'était pure, tous étaient corrompus jusqu'à la moelle - et particulièrement les femmes - de puis le péché originel. C'était à peine si elle s'en rendait compte, par ailleurs.

- J'ai choisi mon camp depuis longtemps : c'est le mien. On peut dire ce qu'on veut, cette guerre est absurde et n'a de motivation que ce qui fait de l'Homme une race impure : l'envie de pouvoir, l'ambition démesurée de quelques êtres qui n'ont pas su rester à leur place.

Ses doigts s'enroulèrent autour du goulot de la bouteille, fins et méticuleux rien que dans ce geste anodin, elle but une nouvelle traite.

- Je tue pour que cette guerre se fasse où elle devrait se faire. En aucun cas la création ne devrait être entachée d'aussi vulgaires querelles - quant au pantin dans cette affaire, ce n'est assurément pas moi.

Elle en avait beaucoup dit, un peu trop peut-être - qu'importait. Si tout se déroulait selon ses plans, cet être retournerait bientôt en Géhenne pour clamer à ses contemporains le danger de la terre. Evidemment, entre les plans de Samara et la réalité future existait une marge dont elle n'avait pas conscience elle-même, obnubilée qu'elle était par son orgueil et sa volonté de vaincre. La persévérance et l'entêtement peuvent avoir du bon, chez elle cela tournait à l'acharnement et il était probable que ce manque certain d'humilité la mènerait à sa perte, un jour.

- Et puis sais-tu, les marionnettes sont si bien faites et si joliment dessinées pour mieux tromper. La beauté qui dissimule la Mort à la faux acérée, mais je ne t'apprends rien, j'imagine. Elle marqua une pause puis reprit à mi-voix : Je ne crois rien de ton prétexte pour rester anonyme. Toi, avoir peur de la méchante chasseresse ? Laisse-moi rire... Qui que tu sois, tu as largement le pouvoir de me vaincre.

Elle accompagna ces paroles d'un large sourire, un sourire de fauve. Dans la taverne, un homme commença à s'étouffer pour une raison ou pour une autre : Samara avait eu raison, la Mort rôdait bien dans ces lieux. Il pleurait et criait, se plaignant de vives douleurs dans les jambes ; quand il souleva son pantalon, d'énormes ganglions étaient apparus sur ses membres inférieurs. Rouge, gonflé, immonde ; une horreur absolue comme on n'en avait pas vu depuis le Moyen-Âge. La jeune femme n'en tint absolument pas compte et continua de boire comme si rien ne s'était passé, son sempiternel petit sourire aux lèvres. Elle reposa la bouteille avec un soupir de contentement.

- Tiens, tiens, il semblerait que les rats ont fait leur office, lâcha-t-elle négligemment. Je crains une prochaine épidémie.

Sourire goguenard de quelqu'un qui sait ce qu'il se passe. En réalité elle n'en avait pas la moindre idée, il ne s'agissait que d'un vague instinct... l'instinct de l'assassin qui pressent le futur surmenage de son amie la Mort.

[C'pas top moi non plus, j'sais XD]
Revenir en haut Aller en bas
Lacryma
Vampire / Aide Menuisier / Alchimiste Ancien Chef de la Maschera
Lacryma


Masculin
Nombre de messages : 127
Age : 37
Race : Démon incarné/Vampire
Date d'inscription : 30/03/2008

Carnet
Âge du Personnage: Plus de trente, trois cents ans ou celui d'un monde, au choix.

La foule des aveugles ne vaut pas un seul voyant.. Empty
MessageSujet: Re: La foule des aveugles ne vaut pas un seul voyant..   La foule des aveugles ne vaut pas un seul voyant.. Icon_minitime1Jeu 5 Juin - 19:12

Lacryma ne sourit que des lèvres, ses yeux s’étaient faits de glace tandis qu’ils paraissaient vouloir plonger dans l’améthyste qui lui faisait face. Ah non, elle ne pensait pas vaincre ? Peut-être, il doutait fortement lui-même qu’elle eut la moindre chance face à lui. Mais au contraire de la jeune femme, malgré toute sa puissance, son intelligence et sa force, il lui était déjà arrivé à lui de goûter à son propre sang, de passer bien près de… Et puis quelque chose chez elle ne collait pas. Elle pouvait bien croire ou vouloir faire croire qu’elle n’était qu’une femme (ou un homme comme elle aurait apparemment préféré l’être) avec une histoire particulière et une profession ‘originale’, il n’en restait pas moins qu’il y avait quelque chose au fond de ces paillettes perdues dans ce violet qui n’était pas tellement plus humain que lui. Il n’avait pas la moindre idée de ce dont il s’agissait, ni même si cela était conscient, c’était peut-être simplement l’expression de sa volonté d’être si forte et si froide, mais tant de forces agitaient le monde, tant n’étaient pas même connus des habitants d’En-Haut et d’En-Bas… Comment être sûr de sa force face à l’inconnu ? Lucifer échappait à l’orgueil de se croire invincible, il préférait trop la vie et la liberté à la victoire. Aussi quand viendrait l’heure de frapper, il décida finalement que jeu il n’y aurait pas et qu’il choisirait un coup seul et bien placé. Pas de risque inutile. Un arrêt cardiaque, c’était si simple.

Elle était revenue, légère et discrète, comme une petite souris. L’odeur doucereuse et écœurante qui semblait se faufiler parmi les hommes comme pour choisir dans quelles chairs elle planterait ses dents. Les bancs, chaises et tabourets raclèrent désagréablement le sol quand les hommes, au contraire d'une Samara indifférente, se levèrent pour voir le spectacle ou s’écarter du malade. On entendit murmurer : la morille…… Mais comme sous le choc, aucun n’osait vraiment bouger, l’homme gémissait en s’observant se touchant puis n’osant plus.


- Elle gronde, tu entends ?, glissa-t-il à la jeune femme. Comme une bête qui s'éveille. Shhhh……… Ça bouillonne là-dedans. Quelle alchimie…… Les rats vont bientôt chanter. Tu sais, ils n'aiment pas les hommes, qui les chassent, les tuent et surtout, les méprisent. Alors qu'au fond, vous êtes tellement semblables. Les humains peut-être un peu plus fous… Et cette envie de tout maîtriser… Tu sais, lors de la grande Peste Noire, ça fredonnait comme ça : puces, pustules, touche-moi, tue-toi, hommes à terre, hommes à terre, viande noire à bouffer frère…

Lacryma pour la première fois depuis longtemps laissa son âme s’approcher de ce corps, de ces bubons répugnants, il en sentait la peau tendue mieux que s’il l’avait touchée, la chaleur fiévreuse, le fiel en dessous, la maladie qui empoisonnait le sang. Avec un amusement similaire à celui que les enfants éprouveraient plus tard à exploser des bulles de plastique, cette extension de lui-même s’introduisit sous la peau gonflée, augmenta la matière putride, encore, encore, jusqu’à éclatement.

Accompagné de leurs cris de dégoûts ou de crainte, ceux qui avaient été touchés par le liquide à l’apparence corrompue reculèrent avec violence. L’odeur de sueur qui faisait la particularité de ces lieux quand elle se mariait à l’alcool, n’était plus cette chaude et âcre effluve d’efforts, de santé maltraitée, de mauvaise hygiène. Elle était froide et acide. Il aurait pu en rire lui qui n’éprouvait de dégoût que pour la médiocrité et de haine que pour ce qui voulait l’emprisonner ; et dans l’agitation ambiante, comme on ne se souciait définitivement plus d’eux, un sourire réussit à s’épanouir. Les traits de Cortorella n’était pas adaptés à ce genre d’expressions malicieuses mais presque innocentes, un amusement lointain, comme les épaulards jouent avec les phoques, amusement de celui qui ne considère pas la Douleur comme quelque chose dont on puisse avoir horreur. Après tout, pour être devenu un bourreau si craint, il avait bien fallu qu’il la connaisse intimement, s’y soumettre pour mieux la maîtriser ensuite. Et comment faire preuve d’empathie quand on n’a en commun que l’apparence ? De la satisfaction aussi à retrouver cette infectieuse fragrance qui lui avait échappé un peu plus tôt. Une épidémie ? Pourquoi pas, après tout, le Diable était déjà sur Terre… Tout cela lui fit momentanément comme un masque bien mal ajusté.

L’instant d’après il avait retrouvé sa gravité, suivait des yeux les deux étrangers qui sortaient précipitamment de la taverne en nombreuse compagnie. Le tavernier exigea d'une voix nerveuse bien que puissante et impérieuse qu’on aille immédiatement chercher un médecin, un homme sortit de nouveau. Lacryma s’était levé lui aussi en même temps que les autres, par mimétisme et il se rassit avec là encore autant de lenteur méfiante que les autres. On finissait ses verres plus rapidement. Certains regardaient dans leur direction, on se demandait pourquoi le jeune homme qui l’accompagnait n’avait pas eu l’air touché par cette scène. Les conversations s’étaient faites plus étouffées, les regards se coulaient avec gêne vers le pauvre bougre si mal en point dont les compères attendaient impatiemment l’arrivée de l’homme de sciences, ne sachant trop que faire pour le soulager, ne désirant pas non plus trop s’en approcher. On espérait qu’il cesse de geindre, qu'il s'en aille. Plusieurs gorgées de vin irriguèrent son gosier comme si Lacryma avait besoin de se revigorer.

Regardant Samara de nouveau, il sentit sa curiosité s’attiser et se faire plus glaciale envers elle. S’il était possible, il aurait autant aimé savoir d’où lui venaient ses yeux, cette capacité à débusquer ceux de son espèce et d’autres choses encore qu’elle de savoir qui il était.


- Tu veux me tuer… Eh bien rappelle-toi d’abord que si frère et sœur se libèrent, que si nous sommes de plus en plus nombreux c’est que certains mots, d’un certain livre ont été prononcés. Et tant que d’autres mots mais de ce même livre n’auront pas été dits à leur tour, crois-tu vraiment que cela cessera ? Il en viendra toujours volontairement ou pas. Tu mourras avant de les avoir tous renvoyés d’où ils venaient. A un moment ou à un autre si tu veux que ça s’arrête il faudra t’allier à des anges ou des démons incarnés. Que tu le veuilles ou non, cette guerre aura lieu ici. De toute façon, que t’importe, tu n’as pas l’air de vraiment apprécier l’humanité qui t’a vu naître. Si tu n'aimes que le sang, tu ne devrais pas avoir besoin de t'embarrasser de prétextes seulement bons pour les bigots.

Lentement, pour être certain qu’elle voit son geste mais qu’elle ne puisse l’interpréter comme une attaque il sortit une longue lame effilée de sa manche la maintenant sous la table, cachée aux regards de spectateurs indésirables.

- D’autre part…

Toujours de manière à ce que personne d’autre ne puisse voir ce qu’il faisait dans leur petit coin sombre, il cala soigneusement les doigts de sa main libre sur le rebord de la table et tout aussi méticuleusement appliqua la lame sur l’une de ses phalanges et appuya d’un coup sec. Ses yeux ne trahirent rien, seules les mâchoires se crispèrent, mais déjà il laissait le couteau planté profondément dans le bois, saisissait de sa main valide ce ridicule bout de doigt et ramenait l’autre contre lui pour éviter que le sang ne se répande trop. S’il en tombait sur lui qu’importe, ce serait assorti à ses habits. Toujours avec soins, après avoir jeté un coup d’œil à son vis-à-vis pour vérifier qu’elle suivait bien l’opération, il rapprocha le membre du moignon : les tendons s’étirèrent comme de minuscules petits bras cherchant à s'étreindre les uns les autres, la chair sembla frémir de part et d’autre, le sang parut couler dans l’autre sens. Il ne s’était pas écoulé deux minutes entre le moment où il s’était coupé et celui où la plaie se refermait. A la suite d’un regard songeur aux quelques traces sanglantes qui maculaient encore sa peau, il les lécha rapidement et méthodiquement, alors qu’il levait de nouveau des yeux aussi expressifs que des miroirs vers Samara.

- Mon corps est difficile à tuer.

La lame retourna dans sa manche, plus une trace ne subsistait de ce qui s'était passé. Ça n’avait été ni de l’esbroufe, ni de la flambe, pas même un avertissement. Juste un test. Et peut-être espérait-il une réaction qui lui en apprendrait un peu plus. Aussi, avoir l'air de chercher à la convaincre de l'épargner n'était pas totalement anodin.

La porte s'ouvrit sur ce qui devait probablement être le médecin tant attendu. Et tant dans la salle d'espérer qu'il ne s'agisse pas de la terrible, de la redoutée, de celle-là dont on ne préférait pas parler par crainte d'attirer le malheur.
Revenir en haut Aller en bas
http://kheleil.deviantart.com/
Samara Visconti
Alchimiste / Grand Exorciste / Humaine (?)
Samara Visconti


Féminin
Nombre de messages : 251
Age : 31
Race : Humaine (?)
Emploi ou fonction : Très compliqué tout ça...
Pouvoirs : Ca aussi d'ailleurs.
Date d'inscription : 20/03/2008

Carnet
Âge du Personnage: Apparemment la vingtaine

La foule des aveugles ne vaut pas un seul voyant.. Empty
MessageSujet: Re: La foule des aveugles ne vaut pas un seul voyant..   La foule des aveugles ne vaut pas un seul voyant.. Icon_minitime1Jeu 12 Juin - 20:11

La pestilence délétère s'insinuait dans les recoins, promenait son museau pâle parmi la foule horrifiée et vrillait son regard aveugle dans les yeux morts de ce cadavre ; telle une bête malsaine elle s'emparait délicieusement de ses prochaines victimes. L'air suppurait de ces relents nocifs que tous ne pouvaient sentir et la Visconti eut l'impression de voir effectivement évoluer l'animal mortel aux dents acérées. A ces relents de mort s'ajoutèrent bientôt les odeurs fétides de la peur et du dégoût, les cris horrifiés et la sueur qui roulait sur des fronts nerveux. Atroce chaleur qui envahissait la pièce... La jeune femme fronça à peine le nez, elle trouvait le spectacle presque intéressant et s'en délectait avec un sourire imperceptible flottant sur ses traits de statue grecque. L'homme infecté par la maladie se trouva subitement agité de convulsions, les bubons explosaient avec un "plop" ironique et laissaient leur contenu s'écouler, brûlant et méphitique, le long de ses membres trop douloureux. Il gémit d'horreur - Samara rit d'extase. Quel tour amusant, vraiment ! Elle avait senti l'âme de son compagnon jouer ce jeu immonde et désespérait de pouvoir en faire autant afin de satisfaire sa soif insatiable de cruauté.

- Viande noire à bouffer frère,
répéta-t-elle... Ces rats-ci dévorent l'âme, pas le corps, ils finiront par tout détruire autour d'eux. C'est l'Apocalypse qui s'annonce, c'est Dieu qui rit de voir Satan impuissant, c'est l'absurde incarné...

Murmure léger, comme si elle ne comprenait pas elle-même, comme si elle ne parlait à personne - au vide peut-être. L'étrange aura mortelle qui s'étalait insidieusement autour d'eux ne semblait guère l'affecter, elle était l'antique reine qui ne voit ni n'entend, qui n'éprouve pas le moindre sentiment. Une gorgée de vin dans sa gorge, elle boit quand d'autres n'osent plus toucher à l'alcool de peur qu'il soit infecté, quand d'autres s'abrutissent pour oublier que la douleur est à leur porte. La Douleur... curieuse divinité, architecte des sens qui éveille dès la naissance à mille voluptés. Comment peut-on aimer si l'on n'a jamais souffert ? Le premier cri d'un enfant est un hurlement de douleur, les premiers cris durant l'amour mêlent souffrance et plaisir. Les vierges qui hurlent des noms vides de sens le font-elle parce qu'elles souffrent ou parce qu'elles aiment ? Cette douleur intime ne sublime-t-elle pas la passion qui en découle ? Délicieuse et ignoble torture, Douleur est éphémère. Douleur est éternelle. Le coeur froid de Samara s'en préserve comme il se préserve de toute émotion, de tout emportement ; elle enferme tout dans une boîte de Pandore mise sous clé jusqu'au jour où elle va exploser.
Elle ne put retenir un triste ricanement en entendant les hurlements ; un homme sortit de l'auberge pour aller vomir - les gens au-dehors croyaient-ils qu'il était déjà ivre ? Curieux comme les tavernes se transformaient vite en univers clos, un univers dans lequel quelques initiés pouvaient évoluer sans que rien ne filtrât. Il y avait l'intérieur. Il y avait l'extérieur. La frontière entre les deux était infime mais perceptible, c'était la frontière entre vie et mort, entre l'eau et le vin - entre le vin et le sang. Quelques passants intrigués se risquèrent à visiter l'auberge et en sortirent aussitôt, agressés par la terrible odeur de cette froide mort acide qui rampait partout, griffant de ses longs doigts pâles les esprits et les âmes trop candides.

- Quel jeu amusant, susurra-t-elle à peine. Il faudra que j'apprenne à faire ça, moi aussi...

Elle évoquait la façon que son vis-à-vis avait eu d'insinuer une part de son esprit dans les bubons, les faisant délicieusement exploser. Plop... Les murmures autour d'eux n'étaient pas sans rappeler ceux qui s'ouïssent dans les chambres mortuaires, les petites gorgées discrètes qui se prenaient dans les verres à toute allure faisaient penser aux veillées mortuaires. Même les visages semblaient plus cernés, plus pâles et plus défaits qu'avant l'incident. Des oeillades se coulaient vers eux, on trouvait ce beau blond un peu trop indifférent pour être honnête, peut-être avait-il déjà tué - un malfrat de plus dans cette ville maudite où nul ne peut se fier à son voisin. Un homme en finissant son verre leur jeta un regard de dégoût et quitta la taverne sans payer, comme si le désagrément du malade et l'indifférence malsaine du jeune blond étaient la faute du tavernier.
On appela un médecin, Samara étouffa un rire : comment un homme de science pourrait-il agir contre ce que chacun connaissait si bien ? La peste bubonique n'était pas curable, toutes les saignées et tous les cataplasmes ne feraient pas survivre cet homme. Ou bien serait-ce comme Sganarelle le déclara dans Dom Juan, le médecin abrègerait-il les souffrances de la misérable créature en l'achevant et lui épargnant ainsi une lente agonie ? Ah, le doux triomphe de la médecine ! Combien de docteurs sont devenus fous faute de pouvoir sauver les vies de leurs patients, combien sont devenus des assassins faute de pouvoir être des dieux à part entière, décidant de la vie et de la mort de chacun ? Cruelle ironie. On ne soignait rien, on soulageait tout au plus, on aggravait bien souvent. Ridicule...
Revenant à la "réalité", elle écouta tranquillement les paroles de son compagnon, un petit sourire aux lèvres et les yeux baissés. La lumière triste autour d'eux déposait des reflets d'or dans le vin blanc qu'elle buvait presque continuellement, calme au possible ; elle hochait doucement la tête comme en signe d'assentiment mélancolique.

- Je mourrai ?... Ma foi c'est possible. Pourquoi pas. Mais crois-tu, il en viendra autant après moi qu'il en viendra des tiens. Combien de Gilgamesh devront naître pour sceller à jamais les âmes dans leurs demeures respectives, je l'ignore, mais je sais que d'autres me succèderont. Qui sait s'il n'en est pas déjà qui veulent accomplir les mêmes desseins que moi ? Je n'ai pas prétention à l'omniscience ni au pouvoir absolu. Mon corps est humain et passera dans peu de temps - quarante, cinquante ans peut-être. Mais d'ici là je me battrai, je ferai de mon mieux pour découvrir ce livre et gagner cette bataille.

Une flamme curieuse s'alluma dans son regard, un sourire presque sardonique déforma ses lèvres et elle fixa son vis-à-vis à travers ses paupières mi-closes. Elle brûlait de l'intérieur et irradiait de quelque chose qui était peut-être de la haine. Une haine farouche et aveugle envers tout ce qui l'entourait.

- Quant à ces prétextes dont tu parles je ne m'en encombre pas. Ils existent, c'est tout. Tu sais, j'ai tué pour la première fois en naissant, comment aurais-je pu alors n'être motivée que par le sang et la cruauté ? C'est juste... ma raison de vivre.

Elle se tut et laissa son regard se perdre dans les méandres irisés de la bouteille qu'elle tenait devant elle. Ce fut à peine si elle fit attention au geste de son vis-à-vis, elle surveilla du coin de l'oeil la vitesse à laquelle il tirait son âme - trop lent pour qu'elle s'en inquiétât, ce n'était pas une attaque, une tentative d'intimidation tout au plus. Elle le regarda, morne et peu intéressée, rapprocher le bout de doigt du moignon - les tissus se reformèrent, le doigt redevint comme neuf. Elle s'y était attendue, bien sûr ; cela demeurait tout de même une opération légèrement impressionnante. Enfin, cela aurait dû impressionner n'importe qui. Samara haussa les épaules et avala une nouvelle gorgée de vin. Elle avait déjà vu des êtres guérir leurs plaies ainsi, pas aussi vite et pas aussi méthodiquement certes, toutefois elle savait fort bien combien il serait difficile de détruire ce corps. Mais qu'est-ce qu'un corps sinon un habitacle inutile et éphémère ? Il faudrait bien un jour que son vis-à-vis quittât cette enveloppe, qu'il revînt à son existence primaire de démon.

- Démonstration inutile. On dirait un être pitoyable qui veut montrer combien il est puissant... Que ce fût ton intention ou pas, c'est lamentable. Peut-être espères-tu de ma part une imitation qui te dévoilerait si oui ou non je suis invincible. Tu as ta réponse : je ne le suis pas et je ne compte pas perdre mes doigts pour te le prouver.

Elle tourna par réflexe la tête vers la porte qui s'ouvrait et se demanda un instant si la Mort allait se montrer en public aussi ouvertement - aurait-elle alors l'apparence convenue de ce spectre en robe noire, une faux à la main ?
Lorsqu'elle vit l'homme bedonnant qui apparut, elle secoua la tête avec un vague sourire, se moquant de sa propre stupidité. Non, bien sûr. La mort, c'est le médecin. Comme toujours. Le scientifique s'approcha du malade et l'examina avec attention, sans trop le toucher. Observant les énormes bubons éclatés, il poussa un soupir désabusé et secoua négativement la tête - un des comparses de l'homme se laissa tomber sur une chaise, la main devant la bouche pour réprimer ses sanglots. Le médecin n'eut même pas à prononcer les mots fatidiques, tous avaient compris que le malade était condamné - l'homme étendu à terre ferma les yeux et poussa un dernier gémissement, long et tragique, avant de se taire sans mourir pour autant. Les yeux écarquillés, il fixa le plafond comme s'il y avait vu la Mort elle-même venant le chercher. Il avait compris que c'était la fin et n'y pouvait rien ; la tragédie comique d'un être qui se débat vainement entre des filets dont il ne pourra jamais s'échapper - il le sait.
Samara soupira doucement et, gardant ses yeux fixés sur l'homme, elle lança :

- Ces imbéciles ne connaissent pas la valeur de la vie et encore moins celle de la mort. Ils ne connaissent pas la beauté de toute cette mascarade... Toi, tu peux comprendre, j'imagine. Le dernier souffle, le dernier gémissement, le dernier regard que l'on capture entre ses mains, sentir la dernière palpitation du coeur et la dernière pulsion de vie est tellement magique, tellement phénoménal... C'est comme une extase, un fruit délicieux et enivrant. Mais peut-être ce médecin a-t-il déjà trop tué pour se souvenir de la délicate saveur, peut-être qu'après une certaine quantité de sang on en oublie de savourer la douleur et la mort. Je ne sais pas.

Songeuse, elle but une nouvelle gorgée et appuya son menton sur son fermé, le coude sur la table.

- J'ai la sinistre impression d'assister à une tragédie jouée par de si mauvais acteurs qu'elle en devient une farce.
Revenir en haut Aller en bas
Lacryma
Vampire / Aide Menuisier / Alchimiste Ancien Chef de la Maschera
Lacryma


Masculin
Nombre de messages : 127
Age : 37
Race : Démon incarné/Vampire
Date d'inscription : 30/03/2008

Carnet
Âge du Personnage: Plus de trente, trois cents ans ou celui d'un monde, au choix.

La foule des aveugles ne vaut pas un seul voyant.. Empty
MessageSujet: Re: La foule des aveugles ne vaut pas un seul voyant..   La foule des aveugles ne vaut pas un seul voyant.. Icon_minitime1Ven 13 Juin - 19:02

Sur la même longueur d'onde ils ne l'auraient finalement été que lorsqu'ils avaient partagé cet amusement face à l'éclatement bubonique. En revanche, l'incarnation de celui à qui on attribuait tous les maux accablant l'humanité ne daigna répondre à aucune des paroles qui lui étaient adressées, en apparence trop attentif au diagnostic dont peu doutait encore, mais en réalité… Test probant donc. Lacryma s'était rendu compte une fois de plus à quel point l'apparence que l'on se donne suffit à ceux qui vous entourent. Encore quelques démonstrations de force et essais de persuasion de le laisser aller et la jeune femme aurait bien fini par oublier son aura un peu trop expressive. Il lui suffisait d'agir à la manière d'un sot ou d'un orgueilleux pour qu'on le classe dans cette catégorie. Etait-ce vraiment si absurde d'imaginer qu'avec l'expérience que possédait un démon majeur, il était peu probable qu'on puisse juger de son attitude comme de celle d'un humain ? Quoique… Bien sûr certains n'apprennent rien avec le temps. Rares sont ceux qui sortent du carcan dans lequel on les a fait grandir, qui osent se dégager de leur tuteur pour s'épanouir ailleurs. Un homme a-t-il grandi au milieu d'une famille aimante, le voilà qui méprisera les êtres froids manipulateurs comme des créatures incapables d'éprouver ou s'abandonner au sentiment qui lui paraît le plus noble. Une jeune fille ayant souffert trahisons et mensonges crachera sur la crédulité et les idéaux, sur ces créatures incapables d'intelligence, d'aller au bout d'un raisonnement, préférant l'aveuglement des sentiments. Telle autre d'une famille travailleuse regardera de manière hautaine le pauvre diable vivant dans la misère parce qu'impuissant à faire preuve d'assez d'énergie pour ouvrer tant de temps qu'il n'aura plus d'autre goût dans sa bouche que la sueur, mais dans ses mains l'or qui la paye. Et cet autre-là que ces amis ont initié à certains arts, qui se moque de ces occupés toujours pressés quand il suffit de voler aux autres leurs fruits. Chacun assuré que l'autre est un imbécile sans se regarder jamais autrement qu'au travers de son miroir favori. Or un miroir c'est déjà une image inversée.

Cette manière de juger des autres était l'un des rares péchés auxquels il ne s'adonnait pas. En dépit de son amour de la liberté, il ne méprisait pas ceux qui se complaisaient dans la servitude, pouvait même le comprendre, tout simplement parce qu'il lui importait peu de se classer, de se définir lui-même. Il était, c'est tout. Le Bien et le Mal ne signifiait rien pour lui et son inhumanité se trouvait peut-être précisément dans ce comportement tellement animal. En fin de compte, il correspondait probablement beaucoup plus à l'image que Dieu se faisait du détachement angélique qu'il n'y paraissait, il n'y manquait que le sens du devoir.

Là où le vin n'avait aucune prise, la langueur toxique de la contagion produisait comme une légère ivresse, un relent de tous ces cœurs qui battraient plus vite, des fièvres à venir. Le sang pulsait aux tempes plus fortement, il en sentait la chaleur sensuelle dans ses veines. C'est presque à regret qu'il se leva.


- Si tu restes, tu vas bientôt te retrouver toute seule, Gilgamesh, revenue des Enfers...

Suivant ce mouvement de foule qui précipitait dehors le peu de ceux qui étaient restés jusque là, le médecin avait prononcé le mot maudit. Alors même qu'il franchissait le pas de la porte, il entendit l'aubergiste exiger ou supplier, question de point de vue, qu'on sortit aussitôt le malade de chez lui. Au dehors, on ne semblait pas bien comprendre ce qui provoquait tant de remue-ménage ce qui palissait les traits de ces hommes qui ressortissaient plutôt rougeauds habituellement. La majorité des badauds se contentaient de coups d'œil curieux poursuivant leur chemin. Cela ne durerait pas longtemps. Pour Lucifer, la lumière du soleil elle-même était déjà changée, comme un premier jour d'automne, moins chaleureuse, plus dorée, moins puissante. Vraiment, Venise entrait dans son Automne, l'Hiver risquait de faire tellement mal. Oh la valse des saisons ! Cela donnait presque envie de danser au milieu des feuilles ou des hommes morts quelle différence ? La rumeur de la Pestilence se répandrait vite comme toujours et bientôt on hésiterait à se serrer les mains, les maisons et les quartiers mis en quarantaines se multiplieraient, l'odeur de la chaux se ferait une fois de plus familière, les étrangers rares. Adieu sourires, bonjour Danse Macabre. Ah…. Qu'il était bon d'être vivant. Et si vraiment c'était Dieu qui libérait de telles plaies sur son humanité, c'était un bien extraordinaire tableau qu'il offrait là.

Tant de réflexions dans une seule tête ! Elles touchaient aussi à cette expression qu'il avait surprise sur les traits de Samara. Cette haine… Cela lui rappelait un autre feu, en lui-même, mais dirigée vers une seule Personne et mêlée d'amour. Cela lui rappelait aussi l'Être en question, et il n'aurait pas été surpris d'apprendre qu'Il fut capable Lui aussi d'une telle haine envers ce monde et ces habitants qui n'agissaient définitivement pas comme Il l'avait décidé. Mais avait-Il jamais rien créé qui restât tel qu'Il le voulait ? Après tout, selon les écrits, Lucifer lui-même n'était-il pas condamné avant même d'avoir été jugé ? Ce n'était pas le genre de risques qu'on prenait à la légère mais au final ça ne faisait que lui donner une nouvelle raison de profiter au mieux de tout ce que l'existence offrait.

Dangereuse, celle qui s'était auto-proclamée Gilgamesh, mais il en voyait désormais l'utilité, avec doigté, les gêneurs pouvaient donc être éliminés par d'autres mains que les siennes et à la beauté glaciale, et ainsi il se permettrait de gagner du temps et de l'énergie. Il connaissait son odeur désormais, sa manière d'être, il ne serait pas sorcier de savoir où lui envoyer de quoi se mettre sous la dent, de se rougir les mains comme elle semblait tant aimer le faire. Il était peut-être bien en train de devenir le meilleur ami qu'elle ait jamais eu, ou du moins son meilleur fournisseur, et ne s'en doutait pas. Les discordances de la Maschera y trouveraient bien leur fin ma foi, tout autant que quelques opposants ou rivaux divers.

Un peu trop d'agitation, une connaissance l'avait vu sortir. Une connaissance curieuse, curieuse de l'attroupement, de l'air des gens, curieuse de l'expression morose de Cortorella. La voix rude et grave, le ton inquiet :


- Oh Lacryma, y s'passe quoi à l'intérieur ?

- … La Morille.


Les noms avaient été prononcés, restait à savoir lequel ferait le plus d'effets, et pour qui. En tout cas, Messire Curieux ouvrit de grands yeux et pâlit d'une manière quasi comique et recula. De toute évidence il connaissait trop son interlocuteur pour imaginer qu'il puisse faire une mauvaise plaisanterie. Il hocha la tête comme approuvant un dialogue silencieux et s'éloigna rapidement, passant le mot autour de lui. La Rumeur commençait de faire son office, sourde pour le moment, et les quelques jours à venir où on douterait encore qu'elle soit fondée ; le temps ferait son œuvre sur les langues et les esprits. Et lui le méchant incarné de décider qu'il allait utiliser ce mouvement de population pour y disparaître bien vite, de croiser encore le regard d'améthyste.

- Si tu veux me tuer fais vite, j'ai à faire… Tu vois je connais d'autres extases que celle du dernier souffle, d'autres scènes à voir ou à jouer et cette mauvaise comédie, elle me plait bien, elle s'appelle la Vie. Sans doute suis-je trop naïf mais elle me surprend toujours, la bougresse. Mais si tu préfères trouver le livre, je suis toujours prêt à négocier ce que j'en sais… Tu sais où je me recueille le jour du.. Seigneur.

Le sourire malicieux n'était pas nécessaire la phrase en était un à elle toute seule, particulièrement au milieu de ce rassemblement. Oh et un peu de pression, se décider dans l'urgence c'était toujours très appréciable aussi. Alors Blonde Inquisitrice ? Quelle arme sera sortie : la lame ou la langue ? La ritournelle des rats lui trottait de nouveau dans la tête.
Revenir en haut Aller en bas
http://kheleil.deviantart.com/
Samara Visconti
Alchimiste / Grand Exorciste / Humaine (?)
Samara Visconti


Féminin
Nombre de messages : 251
Age : 31
Race : Humaine (?)
Emploi ou fonction : Très compliqué tout ça...
Pouvoirs : Ca aussi d'ailleurs.
Date d'inscription : 20/03/2008

Carnet
Âge du Personnage: Apparemment la vingtaine

La foule des aveugles ne vaut pas un seul voyant.. Empty
MessageSujet: Re: La foule des aveugles ne vaut pas un seul voyant..   La foule des aveugles ne vaut pas un seul voyant.. Icon_minitime1Sam 21 Juin - 21:18

[tiens, dans mon précédent post à un moment j'ai marqué "âme" au lieu de "arme". Lapsus significatif Laughing *penser à se relire, un jour*]

Samara ne faisait déjà plus vraiment attention à Lacryma. Lèvres entrouvertes, elle fixait le corps qui irait pourrir dans la tombe... La peste. Son Père lui en avait parlé jadis, lui avait expliqué le fonctionnement de ce fléau et le moyen de transmission d'un être à un autre. Elle ne pensait pas pouvoir être infectée, elle qui était après tout Gilgamesh, la main de son Ange sur cette Terre pleine de vermine. La vermine ? Oui, les rats avaient apporté et leur complainte et leur horreur, ils offriraient leur noire semence à Venise comme un cadeau divin - l'Apocalypse. Bientôt la faim et le malheur s'insinueraient et la ville porterait les couleurs du deuil, mais tout cela importait peu à la Visconti, elle ne voyait que l'instant présent. Ce cadavre infect. Cet homme au corps indestructible. Elle s'en fichait, il avait obtenu ce qu'il voulait. Non, elle ne le prenait ni pour un sot ni pour un orgueilleux, elle en avait vu assez pour savoir que ce n'était pas le cas, il voulait la tester. Elle n'avait jamais joué ce jeu, les êtres qu'elle avait précédemment affrontés s'étaient montrés bien moins perfides, bien moins manipulateurs ; elle aurait aimé connaître l'identité réelle de cet homme qui l'intriguait décidément. Au moins le savoir avant de le tuer, ou du moins d'essayer - bien qu'elle doutât fortement de ses chances face à lui.
Il ne lui avait probablement montré qu'un vague bout de la surface de l'iceberg. Même pas. Il jouait, il attendait, il savait très bien qu'il était le plus fort et elle l'acceptait. Résignation face au monde, stupidité crédule ou aveuglement idéaliste, elle n'avait que faire de mourir si sa mission était au moins un peu remplie. Elle finit la bouteille sans lâcher l'homme mourant des yeux. Juste avant de crever, il se tourna vers elle et la fixa droit dans les yeux. Courageux... ah, les morts avaient toujours un délicieux éclat de lucidité juste avant de perdre la vie et ce n'était pas dénué d'intérêt. Découvrir la réaction de ces futurs macchabées juste avant de quitter l'existence, lorsqu'ils contemplaient enfin l'immense mensonge qu'était cette Création, tout cela était si... Doux. Oui, doux. Il avait peur et en même temps était soulagé, lui première victime de la Peste, comme tous ceux qui apprennent les plus terribles vérités ; Samara était ivre de cette idée. Le litre de vin presque écoulé lui donnait un léger vertige somme toute pas désagréable ; mais depuis quand l'alcool lui faisait-il autant d'effet ? Elle n'en avait pas l'habitude, pourtant.

- Je n'ai jamais été en Enfer.

Ce fut sa seule réponse et elle ferma les yeux, un sourire aux lèvres. Gracieusement, elle se leva et suivit la foule au-dehors ; le soleil l'éblouit l'espace d'un instant - la taverne était si sombre... Le mot fatal courait sur les bouches, les hommes se regardaient et hésitaient quant à la manière d'annoncer la nouvelle terrible à leurs bonnes femmes, on se précipitait pour apprendre le dernier ragot et on reculait d'horreur. La morille ! Quelqu'un hurla que c'était le début de l'Apocalypse, la main de Dieu qui s'abattait sur la Terre pour punir les hommes de leurs péchés. Samara esquissa un sourire : celui qui avait prononcé ces paroles ignorait combien elles étaient empreintes de vérité, oui Dieu lançait enfin sa punition mais ceux qu'il visait n'étaient pas ces créatures faibles et pourtant si parfaites que sont les humains, non, c'était contre les autres qui n'obéissaient plus à ses attentes. Ah comme il doit être déçu de sa création le démiurge, ah comme il doit regretter et se lamenter, désirer la mort de ces incarnés plus ardemment que quiconque, peu importe où il se trouve...
La Bible Profane, la seule chose qui ne fût pas créée de la main de Dieu, la seule chose qui fût capable de dérégler les plans si parfaits du divin, ce maudit livre avait tout bouleversé. Même Dieu lui-même ne pouvait plus prédire le futur désormais, Samara l'aurait gagé. Plus personne ne pouvait prétendre contrôler la situation, ni cet étrange homme fraîchement rencontré si sûr de lui-même, ni l'Ange qui là-haut devait guetter, ni elle-même au fond si impuissante depuis le début. Peut-être était-ce mieux ainsi, au fond, songea la jeune femme dans un éclair avant de se sermonner - c'était un blasphème contre son existence.
Elle fixa le dos de l'homme en rouge. Il serait, elle le jurait, une de ses victimes - elle ferait tout pour le tuer avant de mourir à son tour. Non qu'elle éprouvât quelque haine à son encontre, il lui était parfaitement indifférent, mais l'éliminer ferait probablement cesser ce jeu qui ne devait pas durer plus longtemps.
Soudain elle fut bousculée par un badaud curieux qui se précipita vers l'incarné pour lui demander ce qu'il se déroulait à l'intérieur. Il prononça alors le nom que cet être utilisait sur terre et Samara en resta comme foudroyée. Tétanisée, elle put à peine se retourner vers lui et dut se contenir avec violence pour ne pas laisser transparaître sa stupeur sur ses traits. Lacryma... Il était donc ce Lacryma qui était l'une des premières causes de tout cela ? Oh... elle n'aurait pas aimé le rencontrer aussi tôt. Trop tôt. Quelque chose à l'intérieur d'elle se mit à bouillonner de fureur, quelque chose qu'elle fit taire sans le comprendre. Elle laissa toute sa haine et sa colère transparaître l'espace d'un instant dans ses yeux violacés, des sentiments d'une violence inhumaine dans des prunelles qui l'étaient tout autant.

- Vis tant que tu le peux, gronda-t-elle d'une voix qui ne ressemblait plus le moins du monde à celle qu'elle avait utilisée plus tôt, sans même calculer ses paroles. Je te laisse le choix de me revoir ou pas, si tu comprends certaines choses... "Lacryma".

Le sourire glacé qui s'étira sur ses lèvres ne lui appartenait pas plus que les paroles, elle tourna les talons et disparut dans les méandres de Venise.
Revenir en haut Aller en bas
Contenu sponsorisé





La foule des aveugles ne vaut pas un seul voyant.. Empty
MessageSujet: Re: La foule des aveugles ne vaut pas un seul voyant..   La foule des aveugles ne vaut pas un seul voyant.. Icon_minitime1

Revenir en haut Aller en bas
 
La foule des aveugles ne vaut pas un seul voyant..
Revenir en haut 
Page 1 sur 1

Permission de ce forum:Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum
Venetia in Tenebris :: Venise :: Les Rues-
Sauter vers:  
Ne ratez plus aucun deal !
Abonnez-vous pour recevoir par notification une sélection des meilleurs deals chaque jour.
IgnorerAutoriser